Le 3 janvier 2009, à 18 h 15, une ligne de code changea le cours de l’histoire financière. Décryptage en sept temps d’un bloc, le Genesis Block (bloc genesis en français) qui n’a rien d’un simple « block 0 ».
1. Le kick-off absolu : pourquoi ce bloc genesis est un ovni technique
Contrairement à ses petits frères, le Bloc Genesis ne possède aucun bloc père ; son hash précédent est une rangée de 64 zéros, comme un tabula rasa numérique. Satoshi Nakamoto le mine sur son CPU – une simple puce domestique à l’époque – avec une difficulté Bitcoin de 1, soit l’équivalent d’une partie de Sudoku niveau « facile » aujourd’hui. À l’intérieur, une seule transaction : 50 BTC crées ex nihilo. Drôle de particularité : ces 50 BTC ne sont pas dépensables, car il n’a pas été enregistré dans la base UTXO ; ils dorment pour l’éternité à l’adresse 1A1zP1eP5QGefi2DMPTfTL5SLmv7DivfNa
, un peu comme la première pièce de monnaie scellée dans le socle d’une cathédrale.

2. Le timestamp qui claque : la une du Times comme empreinte temporelle
Satoshi glisse dans le coinbase un clin d’œil journalistique :
The Times 03/Jan/2009 Chancellor on brink of second bailout for banks
Ce titre – extrait du Financial Times, papier du jour – sert de preuve de non-anticipation : impossible d’avoir miné ce bloc avant le 3 janvier. Il pointe aussi un doigt acerbe vers les sauvetages bancaires post-2008 ; un pied de nez devenu manifeste pour quiconque regarde le macro-éco actuel.
3. Les six jours de « repos divin » : bug ou symbolisme biblique ?
Le Bloc 1 n’apparaît que le 9 janvier, soit six jours plus tard. Théories en pagaille : Satoshi testait la stabilité puis a rétro-daté le bloc, ou bien il s’amusait à calquer le récit de la Genèse – six jours de création, un jour de repos. Quoi qu’il en soit, ce time-gap nourrit encore les forums tinfoil-hat.
4. Coffre-fort à ciel ouvert : 99,8 BTC de donations irréversibles
Depuis 2009, des admirateurs envoient des BTC sur l’adresse Genesis – plus de 104 BTC au total à l’heure actuelle – comme autant d’ex-voto numériques. Le plus gros versement : 26,92 BTC en janvier 2024, soit 1,2 million USD à l’époque. Cadeau empoisonné ? Peut-être : chaque transaction alimente la common-input heuristic, une piste pour un jour démasquer Satoshi si ses autres wallets réutilisent des inputs.
5. Le code, la foi et la fortune : le bloc genesis devient une icône
Le Bloc Genesis est la pierre angulaire d’une religion trustless. Il incarne :
- l’immuabilité – impossible à modifier sans détruire toute la chaîne ;
- la transparence – consultable en trois clics sur n’importe quel explorateur ;
- la rareté programmée – 21 millions de BTC finaux, scénario écrit dès le premier noeud.
En 2025, au moment où les ETF spot avalisent la maturité de BTC, le bloc d’origine rappelle que la reine des cryptos n’a ni PDG, ni bailout possible.
6. Explorer le bloc en 30 secondes
- Ouvrez Blockchain.com.
- Tapez
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. - Admirez : une taille de 0,278 Ko, un seul output, zéro frais, et l’empreinte unique d’un monde qui naissait.
7. Le bloc genesis qui traverse les âges
De la crise des subprimes aux ETFs BlackRock, le Bloc Genesis reste la capsule temporelle d’une révolte monétaire. Il n’est pas qu’un morceau de code ; c’est un poème chiffré adressé aux banques centrales : « Vous avez eu votre chance. Maintenant, place aux maths. »
Et, mine de rien, les maths ont plutôt bien tenu la route jusqu’ici.