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Le rapport crypto 2026 de a16z

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L'article annuel des "grandes idées" pour l'année à venir c'est comme une sorte de comité stratégique crypto qui se réunit. Où chaque expert sort sa boule de cristal, mais avec des tableaux, des chiffres et un solide bagage terrain plutôt qu’un tarot douteux. C’est exactement l’esprit du rapport « 17 things we’re excited about for crypto in 2026 » publié par a16z crypto, un document collectif où partenaires, chercheurs et opérateurs listent les grandes idées qui, selon eux, vont façonner le secteur l’an prochain.

Ce n’est pas une prophétie gravée dans le marbre, ni un pitch commercial déguisé, mais une sorte de carte mentale structurée : agents IA, stablecoins, tokenisation, confidentialité, sécurité, prédiction, régulation… autant de pièces d’un puzzle qui dessinent un Internet où la valeur circule aussi facilement que l’information.

Rapport a16z 2026

C’est quoi ce rapport a16z crypto 2026 ?

Le rapport de a16z crypto s’inscrit dans une série annuelle d’articles “big ideas” publiés par différents fonds d'investissements, couvrant plusieurs verticales (apps, bio, infra, etc.), dont une section dédiée spécifiquement au monde des cryptomonnaies et du Web3. L’édition 2026 rassemble 17 contributions de partenaires et d’invités, chacun focalisé sur un sujet précis : paiements en stablecoins, tokenisation d’actifs, rails techniques pour les agents IA, privacy, sécurité DeFi, prédiction, ou encore régulation du marché américain. L’idée n’est pas de dresser un panorama exhaustif de tout ce qui bouge dans l’écosystème, mais de mettre en lumière des axes où les auteurs voient à la fois de la traction réelle et des opportunités de construction pour les prochaines années.​

Le ton du rapport est clairement orienté “builders” : il parle de rails, de primitives, de goulots d’étranglement, de product-market fit, et il assume son biais pro-innovation, tout en rappelant que les données citées proviennent de sources tierces et que rien n’est à prendre comme un conseil d’investissement. Chaque section est signée, ce qui permet aussi de comprendre d’où vient le point de vue : ingénierie, investissement, politique publique, recherche académique. Ainsi, plus que des prédictions, on lit un ensemble d’hypothèses éclairées sur là où les équipes de a16z voient déjà, ou anticipent, une demande de marché.​

Les prédictions 2025

Par simple curiosité, j'ai été voir ce qu'ils avaient mit en avant pour l'année qui se termine. Le rapport « Big Ideas in Tech 2025 » dresse un panorama beaucoup plus large que la seule crypto, en listant des paris forts sur l’IA, l’énergie, la santé, la défense, le numérique grand public et la gouvernance. On y trouve notamment l’idée d’un retour en force du nucléaire pour alimenter la soif énergétique des data centers IA, la montée en puissance des “jobs de l’infrastructure” (ingénieurs hardware, robotique, contrôle, énergie), et l’émergence d’assistants IA et interfaces natives IA dans quasiment tous les logiciels pros.

Le rapport insiste aussi sur la démocratisation de la santé préventive via l’IA, l’usage massif de blockchains pour la preuve de personne et la gouvernance expérimentale (DAOs, vote en ligne), et l’explosion d’outils créatifs IA (vidéo temps réel, compagnons IA, jeux interactifs) qui transforment aussi bien le divertissement que la productivité.​ A vous de me dire s'ils ont plutôt visé juste ou pas.

Stablecoins : du “produit crypto” au rail de paiement global

Un des messages les plus frappants du rapport concerne les stablecoins, présentés comme passés du statut d’outil de niche à celui de passerelle de paiement massif. Selon Jeremy Zhang, ces jetons indexés sur le dollar ont représenté environ 46 000 milliards de dollars de volume de transaction en un an, soit plus de vingt fois PayPal, environ trois fois Visa, et un volume qui se rapproche de l’ACH américain (Automated Clearing House). En parallèle, l’expérience utilisateur s’est nettement améliorée : transfert en moins d’une seconde, pour moins d’un centime, sur certaines infrastructures.​

Cependant, le rapport souligne que la vraie bataille n’est plus sur la vitesse on-chain, mais sur les ponts avec le monde réel : comment connecter ces “dollars internet” aux rails que les gens utilisent déjà (réseaux locaux, QR codes, cartes, solutions marchands) ? De nouveaux acteurs émergent pour résoudre ce problème, en construisant des on/off ramps intelligents, des couches de wallet global, ou des systèmes qui permettent de swapper des monnaies locales contre des stablecoins sans exposer les données sensibles. Ainsi, a16z voit 2026 comme l’année où les stablecoins sortent définitivement du cadre spéculatif pour s’imposer comme couche de règlement de base pour des cas d’usage quotidiens : paiements transfrontaliers, rémunération en temps réel, intégration dans les apps.​

Tokenisation, perps et “naissance on-chain”

Côté finance traditionnelle, le rapport décrit une appétit croissant des banques, fintechs et gérants d’actifs pour mettre des titres classiques “on-chain” : actions, indices, matières premières, obligations. Guy Wuollet insiste toutefois sur un point : beaucoup de projets se contentent de reproduire le monde hors chaîne (tokenisation “skeuomorphique”), sans tirer parti des briques crypto-natives. Selon lui, les produits dérivés perpétuels (perps) ont montré qu’un design né dans la crypto pouvait offrir une meilleure liquidité et une implémentation plus simple que la simple copie des actifs existants.​

Le rapport oppose ainsi deux dynamiques : la tokenisation d’actifs existants et la “naissance on-chain” de dettes ou de produits financiers créés dès le départ sur les rails crypto. Pour Wuollet, tokeniser a posteriori un prêt originaire hors chaîne ajoute peu de valeur, si ce n’est la distribution à un public déjà on-chain ; en revanche, concevoir ces prêts directement sur des protocoles permet de réduire les coûts de mise en service, d’automatiser l’administratif et d’ouvrir l’accès à un panel plus large d’investisseurs, sous réserve de résoudre les questions de conformité et de standardisation.​

Rapport Coingecko

Stablecoins comme “patch” d’infrastructures bancaires vieillissantes

Sam Broner rappelle que la plupart des coeurs du système bancaire actuel datent de plusieurs décennies, tournent sur mainframes, avec du COBOL et des processus batch, et que ces architectures freinent l’innovation. Plutôt que de tout réécrire, de nombreuses institutions explorent l’usage de stablecoins, de dépôts tokenisés ou d’obligations on-chain pour proposer de nouveaux produits tout en gardant leurs vieux systèmes en place.​

Dans cette vision, les stablecoins jouent un rôle de couche d’innovation qui se greffe sur des infrastructures existantes, permettant d’ajouter des fonctionnalités comme les paiements quasi instantanés, la programmabilité des flux ou la tokenisation de bons du Trésor, sans toucher au cœur des bases de données bancaires. Les banques restent dans un environnement qu’elles connaissent, mais exposent une interface plus moderne au monde extérieur. Ainsi, le rapport présente 2026 comme une phase d’“hybridation” : les systèmes anciens continuent de tourner, mais une part croissante de l’innovation se déplace vers les rails on-chain.​

Agents IA, paiements automatiques et “Know Your Agent”

Une grande partie du rapport tourne autour de l’arrivée massive d’agents IA qui agiront de plus en plus de leur propre initiative, notamment en matière de paiements. Christian Crawley et Pyrs Carvolth décrivent un monde où des agents se paient entre eux pour de la donnée, du temps de GPU ou des appels d’API, sans factures, ni emails, ni rapprochements comptables : la logique de paiement devient un “comportement de réseau” plutôt qu’un processus administratif séparé. Des primitives comme x402 sont citées comme exemples de rails qui rendent ces flux programmables et réactifs, avec des smart contracts réglant automatiquement les montants en temps réel.​

Mais pour que ces agents soient vraiment acceptés dans l’économie, il manque un gros morceau : l’identité. Sean Neville estime que le goulot d’étranglement principal n’est plus l’intelligence, mais la capacité à identifier ces entités non humaines. Il introduit l’idée de “Know Your Agent” (KYA), l’équivalent du KYC pour agents IA, avec des identités cryptographiquement signées liant l’agent à un principal, à ses contraintes et à sa responsabilité. Sans cela, les entreprises continueront, selon lui, à bloquer les agents à la porte de leurs systèmes, faute de savoir qui paie, qui est responsable, et comment gérer les risques.​

Gestion de patrimoine, tokenisation et IA comme coach financier

Le rapport voit aussi 2026 comme une année où la gestion de patrimoine se démocratise grâce à la combinaison IA + rails crypto. Maggie Hsu explique que les services de gestion personnalisée, historiquement réservés aux grosses fortunes, peuvent être reproduits à grande échelle grâce à des portefeuilles tokenisés et à des recommandations générées par IA. Les plateformes de trading grand public et les exchanges centralisés peuvent utiliser leur avance technique pour offrir des stratégies actives, avec rebalancement automatique et accès à des produits auparavant réservés aux clients privés (private credit, pré-IPO, private equity).​

Les stablecoins et les fonds monétaires tokenisés deviennent alors le “cash” du portefeuille, avec une couche DeFi (par exemple via des vaults qui arbitrent automatiquement les meilleures opportunités de lending) comme socle de rendement de base. L’ensemble, combiné à des outils d’IA pour analyser le profil de l’utilisateur et ajuster les allocations, pourrait transformer des produits de “préservation de patrimoine” en plateformes orientées “accumulation de richesse”, accessibles à des segments bien plus larges.​

Privacy, “secrets as a service” et effets de réseau des chaînes privées

Un autre axe fort du rapport touche à la confidentialité. Ali Yahya soutient que la privacy n’est plus seulement un bonus mais le facteur clé pour que la finance mondiale bascule réellement on-chain. Il explique que, contrairement aux chaînes publiques sans confidentialité, où l’on peut facilement bouger d’un réseau à l’autre, les blockchains privées créent un effet de verrouillage : il est difficile de “transporter” des secrets, et toute traversée entre zones privées et publiques peut faire fuiter des métadonnées (timing, tailles, corrélations). Résultat : quelques chaînes de confidentialité solides pourraient capturer l’essentiel de la valeur, dans une dynamique de “winner-take-most”​.

Adeniyi Abiodun, de son côté, insiste sur la nécessité de “secrets-as-a-service” : des technos qui fournissent des règles d’accès aux données, du chiffrement côté client et une gestion décentralisée des clés, directement intégrées dans l’infrastructure on-chain. L’objectif est de permettre à la fois la tokenisation d’actifs sensibles (finance, santé, etc.) et l’utilisation d’agents autonomes, tout en offrant des garanties cryptographiques plutôt que de simples promesses contractuelles. Ainsi, les secrets ne seraient plus un patch applicatif mais une composante native de l’Internet.​

Sécurité DeFi, SNARKs, zkVM et “spec is law”

Le rapport constate que même des protocoles DeFi matures, audités et en production depuis des années, ont subi récemment des hacks significatifs, ce qui montre les limites d’une approche de sécurité fondée sur des checklists et des patterns de bugs. Daejun Park appelle à passer à des approches plus strictes, où les propriétés de sécurité sont spécifiées au niveau du design et vérifiées automatiquement par le code, de sorte que toute transaction qui violerait ces invariants soit simplement rejetée.​

Dans le même registre, Justin Thaler explique que les preuves à divulgation nulle de connaissance (SNARKs) sortent progressivement de la sphère purement blockchain. Grâce aux progrès des zkVM, l’overhead de calcul se rapproche d’un facteur 10 000, avec des empreintes mémoire compatibles avec un usage sur GPU grand public ou même sur smartphone. Cela ouvre la voie à du “cloud computing vérifiable”, où l’on peut déléguer des calculs à un serveur tout en obtenant une preuve qu’ils ont été exécutés correctement, sans avoir à les refaire soi-même. Une brique qui intéresse autant les blockchains que les industries plus classiques.​

Prédiction, “staked media” et nouveaux modèles d’information

Le rapport consacre aussi plusieurs sections aux marchés de prédiction et aux médias. Andy Hall y voit des marchés de plus en plus riches, couvrant des événements complexes et croisés, et nécessitant de nouvelles formes d’oracles et de gouvernance pour résoudre les cas litigieux. L’IA peut servir à mieux interpréter les signaux et à fournir des agents traders plus sophistiqués, tandis que la crypto apporte les primitives d’incitation et de preuve nécessaires à des systèmes de résolution plus transparents.​

Robert Hackett, lui, parle de “staked media” : des contenus où les créateurs exposent non seulement leurs opinions, mais aussi leurs positions économiques de manière vérifiable, via des tokens, des lockups ou des prédictions liées à des marchés. L’idée est que, dans un monde saturé de contenu généré par IA, la crédibilité ne viendra plus d’une posture de neutralité supposée, mais de la capacité à montrer et rendre ces engagements auditable on-chain.​

Marché Crypto 2025

Régulation, identité et futur des réseaux

Enfin, Miles Jennings souligne que l’un des plus gros freins à la construction de réseaux blockchain aux États-Unis a été l’incertitude juridique, en particulier sur les questions de titres financiers. Les projets ont souvent dû se contorsionner pour éviter les risques réglementaires, au détriment de la clarté produit, de la gouvernance et de la transparence. Le rapport indique qu’un cadre de régulation spécifique à la structure du marché crypto, actuellement en discussion, pourrait marquer un tournant en 2026 s’il est adopté, en offrant des règles plus claires pour les levées de fonds, les lancements de tokens et les trajectoires de décentralisation.​

En toile de fond, le rapport insiste sur un point transversal : l’alignement entre IA, crypto et identité va devenir central. Qu’il s’agisse de KYA pour les agents, de preuves que les participants à un sondage sont bien humains, ou de mécanismes pour rémunérer automatiquement les sources de données du web, la combinaison de signatures cryptographiques, de rails de paiement programmables et d’agents intelligents redessine les fondations économiques de l’Internet. Ainsi, le rapport de a16z crypto ne se contente pas de lister des tendances : il décrit un futur possible où la frontière entre “finance”, “web” et “IA” s’efface, pour laisser place à un réseau où l’on envoie de la valeur, comme on envoie déjà des paquets de données, à la vitesse d’un clic… ou d’une décision d’agent.​